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A l’issue d’une étude de grande ampleur[1], France compétences publie une 1ère vague de résultats. Ils portent sur les expériences individuelles de reconversion professionnelle. Elles apparaissent nettement plus variées qu’attendues. Cette étude, qui invalide une vision uniforme et linéaire de la reconversion, ouvre des pistes de réflexion stimulantes.

Insatisfaction, vocation longuement murie, opportunité, les motifs et logiques d’engagement qui président à une reconversion professionnelle sont divers, ainsi que les parcours et ressources qui permettent de la rendre effective. Pour mieux comprendre cette diversité, France compétences a interrogé 886 personnes ayant initié ou achevé une reconversion professionnelle ces 5 dernières années.

Des parcours divers, qui témoignent d’un usage variable de la formation et de l’accompagnement

La reconversion n’est pas réductible à un changement de métier, mûri de longue date, mobilisant une formation longue en amont de l’accès à la nouvelle situation professionnelle, et s’opérant sans intervention d’une entreprise. Ainsi, les changements de métier ne concernent que 53% des reconversions.  Les autres consistant en une promotion au sein de l’entreprise d’origine ou un changement du statut de salarié à celui d’indépendant voire l’inverse. Les temporalités sont également variables. Une reconversion peut correspondre à la mise en œuvre d’un projet pré existant, dont la construction s’étale sur plusieurs années. Mais pour 42% des personnes interrogées, inscrites dans une dynamique opportuniste et non pas vocationnelle, il s’écoule seulement quelques semaines entre l’idée et l’engagement dans un parcours. Enfin, dans plus de la moitié des cas, l’entreprise – initiale ou d’arrivée – sert de cadre au projet de reconversion. Ceci-dit, pour les 3 personnes sur 4 qui quittent leur entreprise, l’employeur de départ est une figure absente qui n’offre pas de ressource spécifique pour formuler ni concrétiser un projet de reconversion professionnelle.

Concernant les ressources mobilisées, là encore il n’y a pas de modèle unique. Les deux-tiers des personnes en reconversion ont bénéficié d’un accompagnement ; Près de 60 % ont suivi une formation ; Et 15% d’entre elles n’ont recouru à aucun de ces deux leviers. Certains, réticents à retourner sur les bancs de l’école ou craignant de ne pas valider la certification, préfèrent ne pas se former. Pour ceux qui accèdent à une formation, celle-ci peut être courte. Parfois elle intervient aussi postérieurement à l’entrée dans l’emploi visé. Au final, aucun dispositif d’accompagnement[2] n’est prépondérant dans les parcours. Ces derniers témoignent plutôt d’un usage cumulatif et désynchronisé des ressources disponibles, en fonction des opportunités et besoins, eux-mêmes évolutifs.

Des logiques d’engagement dans un parcours de reconversion professionnelle influencées par de multiples facteurs

L’étude montre que l’insatisfaction professionnelle -liée au contenu du travail ou aux conditions d’emploi- est une dimension omniprésente dans les moteurs de la reconversion. Pour autant, elle se combine presque toujours à des raisons d’un autre ordre : opportunité, existence d’un projet préalable, problème personnel ou de santé. Ce mélange de facteurs déclencheurs bat en brèche l’idée selon laquelle les reconversions seraient soit volontaires, soit subies.

Les résultats révèlent, en outre, que les individus les moins susceptibles d’engager une reconversion sont ceux dont la carrière a été la plus figée au même poste, et qui n’ont bénéficié d’aucune mesure d’entretien de leur employabilité. À l’inverse, ceux qui ont au moins une fois changé d’entreprise ou connu des évolutions professionnelles, sont plus confiants dans leurs capacités à apprendre et à se mettre en mouvement. Un tel constat incite à prendre ses distances avec une supposée résistance au changement. Il souligne au contraire son caractère profondément construit et multifactoriel, dans lequel les politiques d’entreprises jouent un rôle majeur.

[1] Conseil en évolution professionnelle, bilan de compétences, aide à la création ou l’incubation d’entreprise, appui d’un service RH, formation…

[2] Interrogation -au sein d’un échantillon représentatif de 5162 actifs- de 886 personnes ayant initié ou achevé une reconversion professionnelle ces 5 dernières années, complétée par 45 entretiens approfondis.